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La France est le premier pays exportateur de produits cosmétiques, avec près de 16 milliards d’euros d’exportations par an. Ce secteur représente la deuxième contribution à la balance commerciale du pays, avec un solde positif de 10,6 milliards d’euros en 2020. Véritable fleuron industriel, la filière cosmétique française exporte la moitié de sa production, notamment vers l’Europe, les États-Unis, la Chine et la Corée, où les ventes ont connu des hausses spectaculaires.
Dans un contexte global où l’industrie peine parfois à se renouveler, le secteur cosmétique fait figure d’exception. Porté par un tissu d’entreprises avant tout familiales (pour 82% d'entre elle) et implantées en région, il combine innovation, excellence industrielle et ancrage territorial. Avec 45 milliards d’euros de chiffre d’affaires et près de 250 000 emplois, la filière occupe une place stratégique dans l’économie française.
Mais cette réussite n’échappe pas aux mutations profondes du marché : nouvelles attentes des consommateurs (écologie, transparence, production locale, digitalisation), montée en puissance de marques étrangères, questionnement sur les normes de beauté et leurs impacts sur la santé... Dans ce contexte, la recherche joue un rôle essentiel pour accompagner ces transformations.
C’est dans cette dynamique qu’est né le Cross Disciplinary Programs (CDP) Cosméthics, programme de recherche interdisciplinaire lancé en 2018 et renouvelé en 2021 sous l’appellation Cosméthics 2.0. Il propose une approche globale des cosmétiques – de la molécule aux usages sociaux – pour mieux comprendre comment ce secteur articule beauté, bien-être et santé. Encore peu exploré par la recherche académique, en particulier pour la période allant des années 1930 à nos jours, le domaine cosmétique soulève pourtant des enjeux cruciaux pour nos sociétés contemporaines. Cosméthics 2.0 entend y apporter une contribution scientifique ambitieuse, en croisant les regards et en tissant des partenariats nationaux et internationaux.
Objectifs et enjeux
Au croisement de la beauté et la santé, de la jeunesse et du vieillissement, du corps et de l’estime de soi, Cosméthics interroge les sciences, l’économie, les territoires, les normes et les usages sociaux. Derrière la question du "vieillissement à tout âge, son ambition est d’affiner l’analyse des modèles sociaux et culturels liés aux questions des usages de ces produits, à leur rôle dans l'économie du bien-être, mais aussi de mieux comprendre les enjeux des acteurs économiques de cette filière. Dans cette perspective Cosméthics favorise des collaborations disciplinaires inédites afin de repenser les approches traditionnelles souvent cloisonnées. Aujourd'hui quatre thèmes animent le projet :
1. Santé de la peau
La peau, première interface entre le corps et le monde extérieur, est au cœur des préoccupations cosmétiques. Du côté de la recherche fondamentale, les travaux portent sur la dérégulation de la pigmentation, le rôle des enzymes clés dans la mélanogenèse, ou encore le développement de modèles de peau pigmentés, essentiels dans un contexte réglementaire interdisant les tests sur animaux.
En parallèle, les entreprises développent des soins anti-âge intégrant les attentes croissantes autour du bien vieillir, du self-care et du contrôle de l’apparence. Cette attention portée à la peau reflète une évolution sociale plus large, où la préservation de la santé physique et de l’image de soi prend une importance croissante dans toutes les classes d’âge, en particulier dans le cadre d’un vieillissement démographique généralisé.
2. Bien-être
À l’interface entre santé et beauté, le bien-être est devenu une dimension clé des usages cosmétiques. Portée par l’essor de l’industrie du care – renforcé par la crise sanitaire – cette notion s’inscrit dans des pratiques d’entretien du corps visant à maintenir ou restaurer l’équilibre physique et psychologique.
Le programme s’intéresse particulièrement au rôle du thermalisme et des cosmétiques thermaux, en explorant leurs dimensions techniques, sociales, culturelles et territoriales, notamment dans le cadre d’usages post-cancers, post-traumatiques ou dans la recherche d’une meilleure estime de soi.
3. Acteurs économiques
L’évolution du secteur cosmétique, depuis les années 1930 jusqu’à aujourd’hui, constitue un autre axe central du programme. Cette période permet de comprendre les fondations de la filière actuelle, marquée par la mondialisation, l’élargissement des clientèles et une technicisation croissante des produits.
Au-delà de l’innovation, aujourd’hui bien étudiée, Cosméthics 2.0 explore la manière dont les entreprises tentent d’anticiper les évolutions sociales, économiques ou culturelles. Cette capacité d’anticipation s’exprime notamment dans la coexistence – parfois paradoxale – entre haute technologie et retour au naturel, à travers des cycles à identifier (techniques, consommation, normes).
4. Comportement des usagers
Les attentes des consommateurs évoluent rapidement. À la traditionnelle évaluation bénéfice/risque, se substitue de plus en plus une logique sécurité/danger. Les pratiques de pigmentation, l’addiction à la beauté, le rôle des influenceurs, la quête de transparence, sont autant de thématiques suivies de près par les marques et les chercheurs.
Par ailleurs, les préoccupations environnementales deviennent structurantes : pollution des produits, emballages plastiques, gestion des déchets, et impact des formulations sur la santé humaine et les écosystèmes. Ces transformations exigent des réponses techniques, scientifiques et réglementaires que le programme cherche à mieux comprendre.
Enfin, un chantier méthodologique transversale vise à penser le croisement des données. Issues de disciplines variées (médecine, psychologie, gestion, histoire…), elles doivent être rendues interopérables pour permettre une réelle cumulativité scientifique.
Ce chantier, amorcé dans la première phase du programme, implique un travail méthodologique rigoureux sur la structuration, le partage et la réutilisation des données, dans le respect des exigences juridiques et éthiques. À travers des partenariats avec des experts de la science ouverte, le programme cherche à construire un écosystème numérique robuste, au service d’une recherche collective et évolutive.
Un programme transdisciplinaire à vocation nationale et internationale
Construit dans une perspective globale et intégrée, le programme s’appuie sur une équipe interdisciplinaire originale qui lie Histoire, Gestion, Psychologie, Sciences de l’Information et de la Communication, Chimie-Biologie, Pharmacie et Santé publique. Il est conçu également pour travailler en étroite collaboration avec des structures professionnelles et industrielles.
Cette configuration interdisciplinaire inédite réunie un consortium de chercheurs nationaux, européens et internationaux. Elle permet au projet de mobiliser des expertises tant théorique qu’expérimentale en combinant des entrées disciplinaires rarement réunies sur une thématique plus classiquement associée à d’autres régions (Centre-Val-de-Loire en tête). Il est l’occasion de faire de Grenoble pôle de recherche dans le domaine concerné, pour développer des réflexions et des applications nouvelles issues des capacités académiques comme des liens étroits avec les industriels du secteur.
Aujourd’hui le programme Cosméthics 2.0 bénéficie d’une reconnaissance affirmée aux échelles régionale, nationale et internationale. Soutenu par des instances majeures telles que le CNRS, les pôles de compétitivité Cosmetic Valley et Cosmet’in Lyon, ou encore le GDR Cosm’actifs, il est également reconnu par des structures de référence comme le Conseil scientifique de la filière parfum-cosmétique, la Maison des cosmétiques ou le Conseil scientifique de l’Osmothèque.
Cette reconnaissance s’appuie sur l’originalité de son approche interdisciplinaire, qui croise les regards de la médecine, de l’histoire, des sciences du vivant et des sciences humaines. Elle a permis au programme d’entrer en dialogue avec d’autres projets soutenus par l’ANR, comme Cosm’actifs (coordonné par R. Daniellou et N. Huang), et de s’inscrire dans des dynamiques de coopération à l’échelle mondiale. C’est ainsi que Cosméthics 2.0 a été adossé à l’International Research Network (IRN) Cosmetic, réunissant des partenaires en Malaisie, au Japon, au Ghana et en Côte d’Ivoire.
Cette ouverture se traduit également par le développement de collaborations institutionnelles fortes (CNRS, UGA, AgroParisTech) et de partenariats avec des acteurs industriels de premier plan dans le domaine des cosmétiques, tels que Biotherm, Clarins ou Naos.
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